Cette condamnation est faite sur des souvenirs... d'une dizaine d'année
Observation n° 19 : cette condamnation est faite sur des souvenirs... d'environ une dizaine d'années (...) et est d'autant plus opportune qu'il s'agit de désobéissance grave
La boucle est bouclée. Nous revenons à la question de l'imprimatur et de la condamnation effectuée par le Saint-Office. Pour rappel, nous sommes en janvier 1960 : les censeurs qui écrivent rappellent donc des faits qui se sont déroulés aux alentours de 1950. En 1946, on demande au Père Migliorini de cesser de diffuser les extraits de l'œuvre. Ensuite, en 1948, vient la déclaration du Pape Pie XII. Enfin, en 1949, Mgr Giovanni Pepe et le Père Girolamo Berutti essaient d'enterrer l'œuvre en ordonnant que le Père Berti leur remette les écrits de Maria Valtorta. Évidemment, cela n'a pas lieu.
On s'interroge néanmoins : depuis quand une condamnation est basée sur des souvenirs qui datent d'une dizaine d'années ? On ne peut pas faire plus imprécis, d'autant que les censeurs ne précisent pas exactement à quels souvenirs ils se réfèrent. On ne les évoque tout simplement pas. Or, quand on condamne une œuvre, ne doit-on pas se baser sur des faits bien établis ?
De plus, rappelons que dans les années 1945-1950, aucune condamnation officielle n'a été écrite. On a bien demandé au Père Migliorini de cesser la diffusion d'extraits de l'EMV, mais il s'agit d'une demande. Quant à la convocation du Père Berti en 1949, elle est illégale et illicite et il n'y a pas de traces officielles de cette entrevue. On ne sait où est passé le document que le Père Berti a dû signer. Cette condamnation basée sur des souvenirs n'est donc pas crédible.
L'Osservatore Romano va toutefois plus loin et dit que la publication de l'œuvre (à partir de 1956) constitue une désobéissance grave. Rappelons quand même que le Pape lui-même a encouragé cette même publication en 1948. Or cet imprimatur oral est juridiquement valable, si on en croit l'avis de Mgr Edouard Gagnon29. L'éditeur et l'auteure n'étaient donc pas en faute en publiant l'œuvre. Quant à l'absence d'imprimatur d'usage, accordé par un évêque italien, comme le voulait le Pape, soulignons que le Saint-Office a tout fait pour que ce dernier ne soit pas accordé. Les censeurs font preuve d'une mauvaise foi absolue en accusant l'EMV de ne pas en avoir reçu, parce qu'ils ont précisément fait en sorte que l'œuvre n'en ait pas.
L'Osservatore a donc un parti pris bien énoncé, et n'est pas impartial dans sa condamnation. Celle-ci perd dès lors de sa force et de sa cohérence, puisque les censeurs se basent sur des souvenirs confus, imprécis, et méprisent l'avis du Pape et des autres personnalités de l'Église, qui sont pourtant « de bonne foi », selon les auteurs de l'article.