Propos n° 3 : le Saint-Office a interdit la publication de l'œuvre10
Les Dominicains affirment que « le Saint-Office a interdit définitivement (sans correction possible) l'œuvre un an plus tard, en février 1949. Les quatre premiers volumes furent pourtant publiés, sans Imprimatur, de 1956 à 1959. Le 16 décembre 1959, les livres édités furent mis à l'index. L’Osservatore Romano publia la mise à l'Index accompagnée d'un article justifiant la condamnation. »
L'œuvre a-t-elle été interdite en 1949 par le Saint-Office ? À cette date-là, le Père Berti est convoqué par Mgr Giovanni Pepe et Girolamo Berutti. On lui somme de ne pas parler et de remettre tous les manuscrits (qu'il n'a pas en sa possession, ils sont chez Maria Valtorta) ainsi que toutes les notes dactylographiées. « Ici, ils resteront comme dans une tombe », déclare Mgr Pepe.
Voici ce que raconte l'Affidavit du Père Berti :
"Mais, en 1949, le Saint-Office, dont le cardinal Alfredo Ottaviani fut, par la suite, le secrétaire, et Mgr. Pietro Parente l'assesseur, convoqua le procureur général de l'Ordre des Servites de Marie et le Père Corrado M. Berti, considéré comme l'instigateur principal.
"Mgr. Pepe et le Père Berruti, OP, responsables du Saint-Office, lurent le jugement [du Saint-Office] et voulurent que le Père Berti le signe.
"Avec cette décision, ils commandèrent au Père Berti de remettre au Saint-Office tous les manuscrits et copies dactylographiées de Maria Valtorta dans le but évident de les détruire ou de les garder enfermés à jamais : "Ici, ils resteront comme dans un tombeau", déclara Mgr. Pepe.
"Le Père Berti remit tous les documents dactylographiés en sa possession, mais il ne put livrer les manuscrits, conservés par l'écrivain [Valtorta], ni livrer toutes les copies dactylographiées [certaines étaient] possédées par d'autres personnes qui ne voulaient pas s'en séparer.
"En outre, et enfin, le Saint-Office interdit la publication de l'ouvrage, menaçant de le mettre à l'Index en cas d'éventuelle publication.
"Le Père Berti ne put révéler au Saint-Office les paroles dites par le pape Pie XII en audience, car il ne fut pas autorisé à parler. Il fut seulement autorisé à écouter et à signer le jugement, sans commentaires. Telles étaient les méthodes de l'époque avant le Concile [Vatican II].
"Le Saint-Office, cependant, fut clément envers l'infirme Maria Valtorta et ne lui a pas signifié le jugement.
"Elle le sut nécessairement par le Père Berti, et en fut bouleversée. Son état s'aggrava11.
Normalement, toutes les condamnations du Saint-Office sont répertoriées et archivées dans les Actes du Saint-Siège12. Nous n'avons cependant aucune trace de cette fameuse condamnation, qui semble se produire sous la contrainte, puisqu'on refuse que le Père Berti puisse s'exprimer.
Sauf erreur de notre part, toute position officielle du Saint-Office doit être écrite et publiée, ne serait-ce que pour que le monde sache sa décision sur un sujet traité. À défaut, le jugement qui est prononcé dans l'Affidavit du Père Berti n'est pas valable.
Il est vrai que la première publication de l'œuvre se produit bien entre 1956 à 195913 mais, dans son article en 1960, l'Osservatore Romano explique que la mise à l'Index a avant tout eu lieu à cause de l'absence d'imprimatur.
Ces volumes n'ont pas le moindre « imprimatur », comme le requiert le Canon 1385, 1 n.2 C.I.C14.
Le Père Berti le signale lui-même :
"L'Osservatore Romano, dans un article de ce jour, justifiait la condamnation précitée, non pas pour des erreurs doctrinales, mais pour le délit de désobéissance. Mais en vérité, il n'y avait aucune désobéissance, puisque le pape Pie XII, en 1948, avait dit : "Publiez [l'œuvre] ", et que seul le Bureau du Saint-Office, à qui elle avait été soumise, avait étrangement interdit sa publication15.
Ajoutons enfin que le Saint-Office revint lui-même sur sa décision en 1961.
"En Décembre 1960, le Père. Berti fut appelé au Saint-Office où il fut très aimablement reçu par le Père Marc Giraudo, OP, commissaire de cette Congrégation.
"Le P. Berti, voyant que cette fois, il pourrait dialoguer calmement, il relatait au commissaire les mots ("Publiez [l'œuvre] ") prononcés en audience par le pape Pie XII en 1948, et lui apportait la photocopie des attestations sur la vie de Jésus [c.à.d. Le Poème ...] par Maria Valtorta. Trois de ces attestations s'avéraient être établies par les consultants du Saint-Office : celle du Père. [Plus tard, cardinal] Bea, SJ, celle de Mgr. Lattanzi et celle du Père. Roschini, OSM.
"Le Père Giraudo, qui ignorait tout des paroles de Pie XII et des attestations de ces trois personnages du Saint-Office lui-même, reçut plusieurs fois le P. Berti par la suite. Après avoir consulté ses supérieurs et réfléchit sur les attestations, il prononça ces paroles : "Continuez à publier cette seconde édition. Nous allons voir comment le monde la reçoit".
"Et c'est ainsi que Le Poème est sorti, et continue à sortir, non seulement par ordre de Pie XII, mais aussi avec l'approbation du Saint-Office (1961).
On peut donc concevoir, même avec l'abolition de la mise à l'Index en 1969, que le Saint-Office n'était pas contre la seconde publication de l'œuvre, mais c'est un fait souvent méconnu.
En conclusion :
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Oui, les quatre premiers volumes furent publiés, sans imprimatur, de 1956 à 1959.
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Oui, l'œuvre de Maria Valtorta a bien été mise à l'Index en décembre 1959 et un article de l'Osservatore Romano paraît en janvier 1960 pour justifier la condamnation.
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Non, le Saint-Office n'a pas interdit définitivement (sans correction possible) l'œuvre. D'abord, l'entrevue avec le Père Berti et les membres du Saint-Office et la condamnation de l'œuvre n'a jamais été répertoriée dans les Actes du Saint-Siège. Pour qu'une condamnation soit effective, il faut bien qu'elle soit publiée et attestée. Ensuite, le Saint-Office revient lui-même sur sa décision en 1961 lors de la seconde édition de l'œuvre.